Oui, la perspective d’ouvrir d’autres établissements peut être grisante. Mais êtes-vous vraiment prêt?
J’ai récemment rencontré un nouveau restaurateur qui célébrait le premier anniversaire de son établissement. Selon lui, son année s’était bien déroulée. Pourtant, j’ai eu l’impression que les choses ne s’étaient pas aussi bien passées qu’il l’avait espéré.
Nous avons fait le tour de la question, passant du marketing aux prix des plats. Puis j’ai changé de sujet et lui ai demandé comment allait sa famille. Nouvellement arrivé au pays, il m’a parlé en termes élogieux de son épouse et de ses enfants, et des portes que le Canada lui avait ouvertes. Après tout, il est le fier propriétaire d’un restaurant.
Puis je l’ai vu baisser le regard. Il m’a avoué que son seul regret était de ne jamais avoir de temps pour sa famille.
Il n’avait eu que quatre jours de congé pendant sa première année d’activité. Il était toutefois convaincu que les choses allaient s’améliorer et qu’il passerait bientôt plus de temps avec ses proches.
C’est à ce moment qu’il m’a annoncé la chose la plus surprenante que j’aie entendue :
il était impatient d’ouvrir un deuxième établissement, et son agent d’immeuble était déjà à la recherche d’un local!
J’étais tout simplement estomaqué. Voilà pourquoi j’ai décidé de faire le point. Pas seulement avec lui, mais aussi avec vous tous qui songez à prendre de l’expansion.
Je comprends l’attrait des établissements multiples : si vous avez réalisé un certain profit à un endroit, vous vous dites que vous pourriez doubler ou tripler ce profit en ouvrant un ou deux autres restaurants.
Même s’il est possible de gérer plus d’un restaurant avec succès, si vous souhaitez maintenir un semblant d’équilibre travail-vie personnelle (et, croyez-moi, vous le devriez), vous devez absolument faire ce qui suit avant de considérer sérieusement la chose.
1. Trouver le bon associé
Comme vous ne pouvez être partout à la fois, vous ne devriez envisager la croissance qu’une fois que vous aurez trouvé quelqu’un pour vous épauler au quotidien. Libre à vous d’opter pour un associé au sens juridique du terme, un directeur général, etc., ce qui compte, c’est de trouver quelqu’un d’aussi passionné et engagé envers votre entreprise que vous l’êtes. Après tout, ces aspects ne s’enseignent pas et vous ne devriez pas confier de grandes responsabilités à quelqu’un qui ne s’investit pas entièrement dans votre entreprise.
Les restaurateurs choisissent parfois de s’associer à un membre de leur famille ou à un ami. Si cela peut sembler logique, vous devez toutefois savoir que rien ne peut ruiner une relation plus rapidement que les affaires.
Une fois la bonne personne trouvée, vous devez lâcher graduellement les rênes et laisser à l’autre l’occasion d’apprendre de ses erreurs, comme vous l’avez fait. Concentrez-vous sur les résultats plutôt que sur la façon dont ils ont été atteints. Car, même si vos méthodes fonctionnent, elles ne sont pas pour autant la seule façon de faire.
2. Établir des politiques et des procédures
Prenez n’importe quelle bonne chaîne de restaurants et vous constaterez que la structure est un domaine dans lequel elles excellent.
Disposez-vous d’un manuel d’employé qui décrit clairement la vision de votre entreprise?
Ce manuel doit contenir des politiques et procédures qui définissent les normes à respecter rigoureusement. Cette approche permet de maintenir la qualité du service et des plats même si vous n’êtes pas là pour tout superviser.
Tout doit être mis par écrit : code vestimentaire, formation du personnel, gestion de l’inventaire, recettes, conduite des employés, descriptions de postes, tâches à effectuer à l’ouverture et à la fermeture, gestion des médias sociaux, etc. Sans cela, vous n’aurez aucune façon d’obliger votre équipe à rendre des comptes.
3. Évaluer votre santé financière et le potentiel de rentabilité
La situation financière de votre établissement actuel doit être assez bonne pour pouvoir supporter la baisse de revenus qui risque de se produire pendant la concrétisation de votre nouveau projet. Même si la plupart des restaurateurs espèrent que ça n’arrivera pas, d’après mon expérience, et celle de mes pairs, le rendement diminue presque toujours. Si vous êtes la force motrice derrière le succès de votre restaurant, il va de soi que les ventes risquent de baisser un peu quand vous allez concentrer la majorité de votre énergie ailleurs. Heureusement, les choses devraient se placer rapidement si elles sont bien gérées.
Enfin, il ne sert à rien de vous imposer, à vous et à votre famille, tout le travail, le risque et le stress associés à l’ouverture d’un deuxième établissement si cela ne vous permet pas à moyen terme de profiter d’un mode de vie plus confortable. Vous devez donc évaluer soigneusement le potentiel de profit d’un autre établissement avant de vous lancer.
Bien sûr, la décision de prendre de l’expansion ou non ne repose pas que sur ces questions. Mais une fois ce qui précède tout bien considéré, le restaurateur dont je vous parlais a décidé d’y penser à deux fois et même de se consacrer plus à sa famille.
Quand il sera prêt, il aura toutes les cartes en main pour ouvrir un deuxième restaurant.