On peut créer une bonne équipe en misant moins sur l’âge et plus l’embauche, la culture, la formation et la motivation.
En restauration, la main-d’œuvre est souvent à l’image du menu, c’est-à-dire plutôt variée. Les aînés travaillent plus longtemps, les jeunes entrent sur le marché du travail et les générations entre les deux sont au cœur de leur vie active… ce qui donne des équipes multigénérationnelles. Comme restaurateur, il devient plus nécessaire que jamais d’apprendre comment gérer ces équipes.
Chaque génération a un mode de vie, des expériences et des compétences différentes. Si d’aucuns pensent qu’il faut satisfaire les attentes de chaque génération pour éviter la frustration, les conflits et le roulement, Scott McDeivitte, responsable des solutions clients pour la division de l’Ontario de Service alimentaire Gordon, est plutôt d’avis que l’employeur qui ignore les attentes globales risque de démotiver tous ses employés, peu importe la génération à laquelle ils appartiennent.
Au-delà des particularités des générations, les gestionnaires doivent reconnaître la personnalité, les forces et les faiblesses de chaque travailleur. Cela permet non seulement de communiquer de façon efficace et de créer un climat de travail productif et inclusif, mais aussi de renforcer son image de marque et la loyauté de sa clientèle.
Quatre grandes générations
Bien sûr, les gestionnaires ont tout de même avantage à connaître les particularités de chaque génération. Ces connaissances se révéleront précieuses lors de l’examen des demandes d’emploi, la formation, la désignation de chefs d’équipe et la gestion de la dynamique.
Sans tomber dans les stéréotypes – les baby-boomers sont conservateurs, les jeunes générations ne sont pas motivées, etc. – on doit tenir compte de certains traits de caractère typiques de chaque génération :
Les baby-boomers– nés avant 1966 : Orientés vers la réussite, ils ont grandi à une époque
où le travail acharné menait à une augmentation, une prime ou une promotion. Ils apprécient la communication en personne.
La génération X– nés entre 1966 et 1976 : Ces enfants à la clé ont passé beaucoup de
temps à se débrouiller seuls et accordent aujourd’hui de l’importance à l’équilibre travail-vie personnelle. Ils sont toutefois plus efficaces quand on les guide.
Les millénariaux– nés entre 1977 et 1992 : Ils veulent comprendre les choses eux-mêmes et aiment la critique constructive, mais pas se faire dire quoi faire. Une rétroaction fréquente leur permet de se sentir appréciés.
La génération Z– nés après 1992 : Baignant dans les technologies et toujours branchés, ils aiment la rétroaction immédiate et y réagissent favorablement.
Règle générale, pour bien gérer ces quatre générations, on doit se concentrer sur les éléments suivants :
- Embaucher les bonnes personnes.
- Créer une culture adéquate.
- Élaborer un plan de formation.
- Savoir motiver son équipe.
Embauche : une approche réfléchie
« Pour obtenir le meilleur de chaque génération, les restaurateurs doivent s’assurer d’être des employeurs de choix », fait remarquer M. McDeivitte. En plus de faciliter la gestion des employés actuels et de favoriser leur rétention, cela aide à attirer de nouveaux visages.
Avec l’augmentation du salaire minimum dans plusieurs provinces, M. McDeivitte s’attend à ce que les restaurateurs embauchent plus d’employés âgés à temps plein. D’après lui, les employés axés sur la carrière ne coûtent pas plus cher que les employés temporaires à temps partiel, mais contribuent grandement à la stabilité de l’équipe. Il croit aussi qu’il vaut la peine de chercher à retenir ses meilleurs travailleurs en diversifiant leurs compétences. Dans les deux cas, cela nécessite une certaine compréhension des attentes de chaque génération.
Parallèlement, les restaurateurs ont avantage à choisir des gens qui ont des points communs avec la clientèle. Par exemple, si elle se compose principalement de baby-boomers, il vaut mieux opter pour des candidats qui ont de bonnes compétences de communication. En fait, la connaissance des forces est des attentes de chaque génération s’avère utile dans une foule de situations. On doit aussi garder à l’esprit que, peu importe son expérience, un nouvel employé repart toujours à neuf.
« Personne ne sort de l’école prêt à diriger une cuisine, explique M. McDeivitte. Et les candidats qui ont des années d’expérience ne connaissent ni la marque ni la culture de leur nouvel environnement. »
Culture : les personnes d’abord, les générations ensuite
D’après M. McDeivitte, un message de type « Toujours à la recherche de gens pour faire partie de notre équipe » dans les médias sociaux sera plus efficace qu’une affiche à l’entrée. Il conseille aussi de demander à ses bons employés de passer le mot. L’embauche de gens qui connaissent l’entreprise ou des membres de l’équipe améliore la rétention et préserve la culture.
Concrètement, le restaurateur qui perd une hôtesse de 45 ans qui travaillait pour lui depuis des années risque de chercher à la remplacer par quelqu’un à la personnalité semblable. Et, dans ce cas, l’âge ne sera sûrement pas un facteur déterminant. Quand il était restaurateur, M. McDeivitte se concentrait sur les trois traits de personnalité suivants :
1. Le sourire. Le bonheur et l’amabilité s’enseignent difficilement. Les personnes qui ont ce tempérament sont un bon atout.
2. Le sens de l’humour. En restauration, la capacité à rire avec les clients s’avère parfois nécessaire.
3. Une mentalité de service. Les gens qui se soucient réellement des autres sont plus que précieux.
Formation : des idées simples qui changent tout
La formation initiale et continue sont essentielles, assure M. McDeivitte. Et la formation en ligne autodirigée représente un bon point de départ : elle permet de déterminer le rythme des apprentissages et de surveiller la progression.
« L’âge ne constitue pas un frein à l’apprentissage, peu importe la génération à laquelle on appartient », note-t-il. Un employé âgé mettra peut-être plus de temps à terminer sa formation en ligne, mais c’est l’apprentissage qui compte.
Et pour permettre à chacun de s’adapter aux autres, rien de tel comme le mentorat. Par exemple, si un jeune adulte de l’équipe est passionné par la bière et qu’on lui donne l’occasion de partager ses connaissances, toute l’équipe en bénéficiera et le respect du savoir de l’employé s’en trouvera renforcé.
Pour créer un pont entre la formation et la réalité de tous les jours, M. McDeivitte recommande de faire un suivi grâce à diverses activités. En voici deux exemples :
1. Donner un menu à un employé et lui demander d’où viennent les produits ou comment les plats sont préparés. Les membres des jeunes générations ont plus tendance que les autres à se soucier de la présence d’allergènes et des questions éthiques liées à l’alimentation, deux sujets d’actualité.
2. Faire une mise en situation pour démontrer pourquoi les crayons et les napperons à colorier ne sont pas la seule – ni la meilleure – façon de calmer deux enfants agités. Les employés qui ont des enfants ou des petits-enfants savent sans doute qu’il vaut mieux leur apporter rapidement de la nourriture. Une assiette de carottes gratuite aura donc pour effet de calmer les enfants et de prolonger la visite des parents.
Motivation : nourrir la satisfaction
Un employé axé sur la carrière qui a reçu une bonne formation s’attendra à de la rétroaction et de la reconnaissance. Si les récompenses ont globalement un effet motivant, M. McDeivitte précise, par contre, que l’argent n’est pas toujours la meilleure solution. Comme les jeunes travailleurs veulent de la transparence et savent souvent ce que les autres gagnent, les augmentations de salaire risquent de nuire au lien de solidarité.
Cependant, des billets de cinéma ou une carte-cadeau pour un repas dans un autre restaurant sont une bonne façon de montrer que l’on accorde de l’importance au dévouement, mais également à l’équilibre travail-vie personnelle, ajoute-t-il.
Il ne faut pas non plus oublier d’inclure ses employés dans le processus décisionnel quand c’est possible. Les gens sont toujours ravis de voir leurs idées prendre vie, sans compter que l’écoute améliore la communication et la compréhension, ce qui renforce le statut d’employeur de choix.
« Je pense que les restaurateurs qui trouvent des manières d’embaucher, de former et de motiver des gens de tous les âges verront des candidats cogner à leur porte chaque jour », conclut M. McDeivitte.